
La préparation à une journée d'émaillage est une lente mise en route . Elle débute par des idées retenues au fil des cuissons précédentes et des idées surgissant à tout moment. Cependant le moment de s'y mettre demande une attention particulière : sélection des pièces déjà faites pour servir de jalon sur lequel s'appuyer pour aller de l'avant.
Sélection des pièces à émailler, sélection des couleurs claires et foncées avec l'idée de l'agencement dans le four et aussi du temps de séchage-absorption entre les différentes couches des superpositions ( les teintes épaisses et foncées en premier car il faut attendre quelques fois 3 heures entre deux ...).
Ensuite un travail bien physique : brassage des émaux dans les bidons . Certains émaux restent bien homogènes et donc il suffit d'un coup de fouet pour le rendre prêt à l'emploi. Mais certains demandent un décollement progressif du bidon. ils sont compact et dur comme une plaque de plâtre bien prise. Aujourd'hui un de mes émaux blancs m'a demandé 30 minutes pour le rendre utilisable et cela en utilisant ma perceuse munie d'une hélice de brassage car mes mains n'y sont pas arrivées et ensuite au bout de 10 minute il redevenait compact ! donc ...la lenteur est de mise !
Le commencement est laborieux et j'ai mis 3 heures pour émailler ces 7 bols .
Comme le shino est très spécial il convient d'émailler et de cuire tout-de-suite sans laisser passer 1 nuit par exemple pour continuer le travail le lendemain. Il donne beaucoup mieux quand on le cuit tout frais posé.

Il y a des techniques sophistiquées pour émailler : par exemple en utilisant un pistolet spécial et en vaporisant l'émail sur la pièce qui est alors posée dans une cabine d'émaillage. On peut contrôler l'épaisseur des couches et faire de beaux dégradés avec un résultat très fin.
Je préfère émailler de manière plus "primitive" soit en trempant la pièce directement dans le sceau soit à l'aide d'une louche . J'applique aussi des couches au pinceau .
Ce travail est très intuitif , l'attention est totale entre le geste, la rapidité du mouvement , la pose et l'arrêt . Cela doit faire un tout. Trop penser et analyser va empêcher le naturel de se faire et ce sera "retenu" et sans vie. Il y a en même temps la concentration et en même temps le lâcher-prise. C'est assez difficile à expliquer en fait mais c'est fascinant : tout le corps participe de concert avec l'idée qui sous-tend le geste.
Quand les heures passent , il faut rester vigilant car la pose dans le four reste aussi assez "sportive" : désémailler le pied et poser sans coller le bol avec un autre par exemple.
Mais l'attente du résultat donne une certaine émulation !